Quelques principes du placement en accueil familial
Hana Rottman

  Quels sont les principaux éléments qui autorisent une indication de placement d’enfant  en famille d’accueil?

  Actuellement, sont confiés aux placements familiaux thérapeutiques des enfants pour lesquels la pathologie du lien est massive en raison des troubles psychiques parentaux, souvent aggravés par les facteurs d’environnement socio-économique.

Les demandes d’accueil peuvent concerner des enfants très jeunes, voire pas encore nés, mais déjà pris dans une problématique familiale évidemment gravement perturbée, des enfants plus âgés dans l’âge de latence, et également des adolescents..

L’indication de séparation des enfants de leur famille est presque toujours vécue par les travailleurs sociaux comme marquant l’échec du travail de prévention, et non comme une solution parmi les autres pour instaurer un traitement du lien. Une fois le principe de la séparation posé, il se peut que l’indication de placement familial n’intervienne que secondairement, à partir d’une institution qui a d’abord accueilli l’enfant (pouponnière, foyer).

Ce qui paraît essentiel pour que l’enfant puisse bénéficier de l’aménagement de la distance entre ses parents et lui, du travail sur le lien parent-enfant que lui offre le placement familial, c’est l’autorisation implicite ou explicite que ses parents lui donnent de recevoir ce qui peut lui être proposé de bon en dehors d’eux, en particulier par la famille d’accueil mais aussi par l’équipe. Le travail de préparation consiste en partie à poser les jalons d’une alliance entre les parents et l’équipe du placement, en explicitant autant que possible les raisons du placement, le projet thérapeutique qui sous-tend cette séparation inévitablement douloureuse et les modalités du maintien des liens de façon à ce que la séparation ne soit pas vécue comme une sanction, mais comme une aide.  C’est un travail délicat. Il est difficile de maintenir une relation de confiance alors que l’on est séparateur, et il n’est pas facile de parler de séparation sans devenir persécuteur,

Il est essentiel de maintenir une cohérence entre les diverses institutions qui vont collaborer dans le suivi de l’enfant : décision et maintien du placement, car les dissensions des équipes, reflet de l’ambivalence parentale, sont inévitables et risquent d’aboutir à des ruptures de placement.

Quelles sont les caractéristiques essentielles que doit présenter une famille pour accueillir un enfant?

            Sur le plan personnel, certaines formulations, peu techniques, peut-être désuètes restent toujours valables: la chaleur, la sensibilité, la disponibilité, la tolérance, la souplesse, l’amour des enfants, le goût du concret. Paraissent également nécessaires: l’intérêt pour la vie psychique, la capacité et le goût pour la parole, pour l’échange, qui permettra le travail avec une équipe.

            Sur le plan familial, il est essentiel que l’accueil soit un projet que le groupe familial partage ou du moins accepte, ou pourra supporter sans dommage. (Par exemple, la présence d’un bébé ou d’un très jeune enfant au foyer de l’accueillant nous paraît devoir faire reporter le projet d’accueil à plus tard.) La collaboration du père d’accueil est importante, et les textes, actuellement, ne prennent pas en compte comme il le faudrait sa fonction, complémentaire de celle de l’assistante familiale. Car c’est bien une famille qui accueille un enfant, et non une assistante familiale isolée.

            Plus concrètement, il est nécessaire qu’il y ait une place pour l’enfant: espace physique: “son coin”, son lit, du temps disponible pour lui. C’est le problème des assistantes familiales qui travaillent à l’extérieur mais peuvent néanmoins, dans certains cas, assurer un accueil de qualité, pourvu que les choses soient bien définies.

            Enfin, il nous paraît essentiel que la vie de la famille d’accueil ne repose pas sur son salaire d’accueillante, de manière à ce que le départ de l’enfant puisse toujours être pensé et discuté dans une perspective d’élaboration de la séparation et de l’attachement, sans que l’impression de mettre la famille d’accueil en danger ne rende impossible ce travail psychique, pourtant essentiel .

Octobre 2008